Calcul de la fugacité dans des cas simples

Nous avons déjà vu que, pour une gaz parfait pur, et par définition, la fugacité est égale à la pression : \[{f}_{i}^{\left(gp, pur\right)}=P\]

Rappelons que le gaz parfait est une représentation très réaliste du comportement de tous les gaz, sous pression modérée (inférieure à 5 bars, environ). Dans le cadre restreint de ce cours, nous admettrons que les gaz peuvent être considérés comme des gaz parfaits. Le chapitre « Fluides sous haute pression » explique les méthodes utilisées pour représenter le comportement de gaz non parfaits (sous haute pression), en utilisant des équations d'état.

Intéressons-nous maintenant à un liquide pur, à une température \[T\] et à une pression \[P\]. Ce liquide pourra être à l'équilibre avec de la vapeur à la pression de saturation \[{P}^{\left(s\right)}\left(T\right)\]. Nous savons d'ordinaire déterminer cette pression de saturation (corrélation d'Antoine, dont les paramètres sont disponibles pour de très nombreux corps).

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Nous pouvons donc écrire :

\[{f}_{i}^{\left(L,\mathrm{pur}\right)}\left(T,{P}^{\left(s\right)}\left(T\right)\right)={f}_{i}^{\left(V,\mathrm{pur}\right)}\left(T,{P}^{\left(s\right)}\left(T\right)\right)\approx {P}^{\left(s\right)}\left(T\right)\]

en admettant que la pression de saturation du corps pur est suffisamment faible pour que l'on puisse considérer le gaz comme parfait. Mais nous cherchons en fait la fugacité du corps pur liquide à une pression \[P\] différente de sa pression de saturation, pour cela nous allons utiliser la relation :

\[{\left(\frac{{\partial \mu }_{i}^{\left(L,\mathrm{pur}\right)}}{\partial P}\right)}_{T}={v}_{i}^{\left(L,\mathrm{pur}\right)}\]

soit, d'après la définition de la fugacité :

\[{\left(\frac{\partial \left(\ln {f}_{i}^{\left(L,\mathrm{pur}\right)}\right)}{\partial P}\right)}_{T}=\frac{{v}_{i}^{\left(L,\mathrm{pur}\right)}}{RT}\]

En admettant que le volume molaire du corps pur liquide est pratiquement indépendant de la pression, il vient, par intégration :

\[{f}_{i}^{\left(L,\mathrm{pur}\right)}\left(T,P\right)={f}_{i}^{\left(L,\mathrm{pur}\right)}\left(T,{P}^{\left(s\right)}\left(T\right)\right)\exp \left({v}_{i}^{\left(L,\mathrm{pur}\right)}\left(P-{P}^{\left(s\right)}\left(T\right)\right)/RT\right)\]

Le facteur \[\exp\left({v}_{i}^{\left(L\mathit{,}\mathit{pur}\right)}\left(P-{P}^{\left(s\right)}\left(T\right)\right)/RT\right)\] est appelé correction de Poynting.

Il est en général très proche de l'unité (si la pression \[P\] n'est pas trop supérieure à la pression de saturation), c'est-à-dire que le contenu de l'exponentielle est proche de zéro. Par exemple, pour l'eau liquide, cette correction reste inférieure à 1% pour un écart de pression de 10 bars : en fait, la fugacité d'un liquide dépend très peu de la pression.

Et on peut donc, à pression modérée, admettre que :

Fondamental

\[\begin{array}{ccc}{f}_{i}^{\left(V,\mathrm{pur}\right)}\left(T,P\right)& \approx & P\\ {f}_{i}^{\left(L,\mathrm{pur}\right)}\left(T,P\right)& \approx & {P}_{i}^{\left(s\right)}\left(T\right)\end{array}\]

La difficulté est maintenant de savoir calculer la fugacité de chaque constituant dans un mélange. Pour cela, plusieurs approches existent :

  • pour les phases gaz, on utilise une équation d'état. C'est ce que nous ferons, en supposant que l'équation des gaz parfaits est suffisante pour représenter les propriétés des gaz. Les mélanges de gaz seront traités dans le chapitre suivant.

  • pour les liquides, si on connaît les propriétés de chaque liquide pur, il reste à exprimer comment ces propriétés varient lorsqu'on réalise un mélange. C'est ce qui fait l'objet des "modèles de solution" ou modèles de coefficients d'activité.

  • On utilise de plus en plus souvent une approche unifiée pour les liquides et les gaz, grâce à des équations d'état valables pour les deux phases. Cette approche est expliquée dans le chapitre sur les Fluides sous haute pression.

  • les solides sont très souvent des corps purs, ou des phases cristallines à composition déterminée. Dans ce cas, les propriétés sont supposées connues (ainsi qu'on le verra, on a surtout besoin de connaître la température de fusion, l'enthalpie de fusion et la capacité calorifique). Dans le cas de solutions solides, on utilise des approches similaires à celles des modèles de solution pour les phases liquides.