Structure des solutions aqueuses
La théorie classique[1] de la nucléation homogène[2] suppose qu'en solution sursaturée une série de réactions bimoléculaires entre molécules ou ions du soluté donne naissance à des "agrégats", "embryons" ou "clusters". Ceux-ci se forment et se décomposent continuellement respectivement par ingestion ou libération d'une particule.
La nucléation est effectivement observée lorsque ce flux conduit à former des tailles macroscopiques qui correspondent aux premiers cristaux. La présence d'agrégats dans les gaz et les vapeurs a été prouvée expérimentalement depuis longtemps par des méthodes de diffusion de particules, neutrons par exemple. En revanche, leur existence dans les solutions liquides sursaturées telles que celles que l'on rencontre en cristallisation est restée longtemps un postulat. Les travaux les plus avancés sur le sujet ont été menés par l'équipe de Myerson (1990)[7].
Les preuves d'existence d'agrégats de soluté en milieu liquide sont maintenant incontestables ; elles reposent sur diverses expériences :
détection par spectroscopie Raman de nouvelles bandes moléculaires caractéristiques des agrégats en milieu sursaturé
apparition de gradients de concentration dans des colonnes contenant des solutions sursaturées (gradients dus à sédimentation des agrégats plus massifs)
chute dramatique des valeurs du coefficient de diffusion de plusieurs électrolytes ou non-électrolytes dans la zone de sursaturation (voir illustration suivante) et diminution du coefficient de diffusion au cours du vieillissement de solutions sursaturées. Ces comportements sont dus à la formation d'agrégats, plus massifs et plus inertes vis-à-vis de la diffusion. Le degré d'association des agrégats, c'est-à-dire le nombre d'éléments qui les compose, a été déduit des différentes expériences ; une moyenne de 2, 50 et 100 a été respectivement trouvée pour la glycine, le sulfate de potassium et l'acide citrique. Notons enfin que des agrégats ont été mis en évidence également dans des solutions sous-saturées.