Principe général ; expression de la fugacité à partir d'une équation d'état analytique

Isotherme de Clapeyron réel et équation d'état analytique | Jacques Schwartzentruber | Informations complémentaires...Informations
Isotherme de Clapeyron réel et équation d'état analytiqueInformations[2]

Ainsi que le montrent les isothermes de Clapeyron, la courbe \[P\left(v\right)\] à une température sous-critique[3] n'est pas continûment dérivable, et il n'existe pas de fonction analytique unique pouvant la représenter. Dans ce qui suit, nous ferons l'hypothèse que l'on dispose d'une équation unique permettant de bien représenter les branches liquide et vapeur, la jonction entre elles se faisant d'une façon à priori quelconque, mais pas par un segment de droite (y compris en passant pas des valeurs de pression négatives !) - voir l'illustration précédente . On constate que pour une pression donnée sur une isotherme, il peut y avoir une seule solution pour le volume (cas d'une phase homogène) ou plusieurs : dans ce cas, on admet que la racine la plus petite correspond à la phase liquide, la plus grande à la phase vapeur, la (ou les) racine(s) intermédiaire(s) n'ayant pas de sens physique.

On dispose donc d'une seule équation \[P=P\left(v,T\right)\] pour représenter le comportement de la vapeur comme du liquide. De plus, on a l'ambition d'utiliser cette même équation d'état[4] pour calculer l'équilibre liquide-vapeur du corps pur.

On appelle fugacité[5] du corps pur la grandeur \[f\] définie par :

\[g\left(T,P\right)={g}^{\left(\textrm{std}\right)}\left(T\right)+RT\ln\frac{f}{{P}^{\left(\textrm{std}\right)}}\]

L'état standard[6] utilisé dans tout ce chapitre est l'état de gaz parfait pur, à la pression standard de 1 bar. Pour le gaz parfait, la fugacité[5] s'identifie avec la pression.

On utilise très souvent le coefficient de fugacité[7] \[\varphi \], rapport de la fugacité[5] à la pression :

\[\varphi =f/P\]

dont l'écart à l'unité mesure l'écart du fluide réel par rapport au comportement de gaz parfait.

Lorsque, pour un corps pur, on dispose d'une équation d'état[4] sous la forme \[P=P\left(v,T\right)\], le coefficient de fugacité[7] est donné par :

\[\ln\varphi ={\int }_{v}^{\infty }\left(\frac{P}{RT}-\frac{1}{v}\right)dv+Z-1-\ln\left(Z\right)\]

(\[Z\] étant le facteur de compressibilité \[Pv/RT\]).

Démonstration de la relation du coefficient de fugacité

On intègre la relation

\[P\left(T,v\right)=-{\left(\frac{\partial a\left(T,v\right)}{\partial v}\right)}_{T}\]

entre le volume réel du fluide \[v\] et un volume \[{v}_{0}\]. On l'écrit pour le fluide réel et pour le gaz parfait :

\[\begin{array}{ccc} a\left(T,v\right)& -a\left(T,{v}_{0}\right)& =-{\int }_{{v}_{0}}^{v}P\left(T,v\right)dv\\ {a}^{\mathrm{gp}}\left(T,v\right)& -{a}^{\mathrm{gp}}\left(T,{v}_{0}\right)& =-{\int }_{{v}_{0}}^{v}\frac{RT}{v}dv \end{array}\]

on fait la différence membre à membre, en faisant tendre \[{v}_{0}\] vers l'infini (limite pour laquelle le fluide réel devient un gaz parfait), ce qui conduit à :

\[a\left(T,v\right)-{a}^{\mathrm{gp}}\left(T,v\right)={\int }_{v}^{\infty }\left(P-\frac{RT}{v}\right)dv\]

or

\[\begin{array}{ccc} a\left(T,v\right)& =& g\left(T,P\right)-Pv\\ {a}^{\mathrm{gp}}\left(T,v\right)& =& {g}^{\mathrm{gp}}\left(T,\frac{RT}{v}\right)-RT\\ & =& {g}^{\mathrm{std}}\left(T\right)+RT\ln\frac{RT}{{P}^{\mathrm{std}}v}-RT\\ & =& {g}^{\mathrm{std}}\left(T\right)-RT\ln Z+\ln\frac{P}{{P}^{\mathrm{std}}}-RT \end{array}\]

Ces deux relations, reportées dans l'équation précédente[10], conduisent à :

\[g\left(T,P\right)-{g}^{\mathrm{std}}\left(T\right)=RT\ln\frac{P}{{P}^{\mathrm{std}}}+Pv-RT-RT\ln Z+{\int }_{v}^{\infty }\left(P-\frac{RT}{v}\right)dv\]

D'après la définition du coefficient de fugacité[7], le premier membre de cette équation vaut \[RT\ln\left(\varphi P/{P}^{\mathrm{std}}\right)\] , d'où, après simplification, l'équation du coefficient de fugacité[7][11].

L'utilisation de cette relation[12] pour la phase vapeur ne pose pas de problème. Il n'en va pas de même pour la phase liquide, dans la mesure où cela suppose une intégration au travers de la zone diphasique, où l'équation d'état[4] analytique n'a guère de sens physique. Bien que cette opération soit peu justifiable théoriquement, elle est pratiquée couramment, et permet -à condition de disposer d'une "bonne" équation d'état[4]- d'avoir une représentation correcte des propriétés du liquide. On attend d'une "bonne" équation d'état[4] qu'elle fournisse une valeur acceptable de l'intégrale de la pression par rapport au volume dans la zone diphasique, même si la pression elle-même y prend des valeurs fantaisistes - négatives par exemple ! -.

Remarque

On notera enfin que, pour l'équilibre liquide-vapeur d'un corps pur, la condition d'égalité des fugacités[5] conduit à la condition de Maxwell :

\[{\int }_{{v}^{L,\mathrm{sat}}}^{{v}^{V,\mathrm{sat}}}\left(P-{P}^{s}\right) dv=0\]

Géométriquement, cette relation traduit par l'égalité des aires situées entre l'équation d'état[4] analytique et la droite \[P={P}^{s}\] (aires hachurées sur la figure[13]).

On voit ainsi qu'une équation d'état[4] permet de représenter toutes les propriétés d'un corps pur, à partir du moment où son état standard[6] (gaz parfait sous 1 bar) est bien déterminé.