Modélisation des équilibres liquide-liquide

Ainsi que nous l'avons vu pour les mélanges binaires, une démixtion liquide-liquide n'est possible que lorsque le mélange présente une forte non-idéalité. Il est en particulier impossible d'obtenir des équilibres liquide-liquide dans un mélange idéal !

Toute modélisation d'équilibres liquide-liquide suppose donc de disposer d'une expression de l'enthalpie libre d'excès[1] (par exemple NRTL[2]). Autant que possible, on utilisera la même expression de l'enthalpie libre d'excès[1] pour chacune des deux phases, avec le même état de référence[3] par corps pur.

Remarque

Il n'y a que lorsqu'on doit étudier des équilibres liquide-liquide entre une phase organique et une phase aqueuse contenant des électrolytes qu'on utilise des modèles d'écarts à l'idéalité différents pour les deux phases. Mais ce type de situation sort du cadre de ce cours.

Supposons que nous ayons un mélange ternaire donnant lieu à un équilibre liquide-liquide. Si nous numérotons 1,2,3 les constituants et (I) et (II) les phases, cet équilibre est représenté par les équations d'égalité des fugacités[4] entre les différentes phases :

\[\begin{array}{ccc} f_1^{(I)} &=& f_1^{(II)} \\ f_2^{(I)} &=& f_2^{(II)} \\ f_3^{(I)} &=& f_3^{(II)} \end{array}\]

mais, par définition du coefficient d'activité[5], la fugacité[4] du constituant \(i\) dans la phase \(\varphi\) s'écrit :

\[f_i^{(\varphi)}= \gamma_i^{(\varphi)} x_i^{(\varphi)} f_i^{(R_i)}\]

\(R_i\) correspondant à l'état de référence[3] choisi pour le constituant \(i\). La plupart du temps, c'est le corps \(i\) pur.

En reportant cette dernière expression dans les équations d'égalité de fugacités[4], on voit que les fugacités[4] de référence s'éliminent, et il ne reste que l'égalité des activités[6] :

\[\begin{array}{ccc} \gamma_1^{(I)} x_1^{(I)} &=&\gamma_1^{(II)} x_1^{(II)} \\ \gamma_2^{(I)} x_2^{(I)} &=&\gamma_2^{(II)} x_2^{(II)} \\ \gamma_3^{(I)} x_3^{(I)} &=&\gamma_3^{(II)} x_3^{(II)} \end{array}\]

À ces trois équations d'équilibre entre phases, il faut rajouter les deux équations de normalisation des fractions molaires[7] :

\[\begin{array}{ccccccc} x_1^{(I)} &+& x_2^{(I)} &+& x_3^{(I)} &=&1 \\ x_1^{(II)} &+& x_2^{(II)} &+& x_3^{(II)} &=&1 \end{array}\]

Il suffit de fixer une composition pour que les 5 autres puissent être déterminées.

Une fois que nous savons calculer des équilibres, il est possible de comparer des équilibres calculés à des équilibres mesurés expérimentalement, et donc d'ajuster des paramètres de modèles pour représenter au mieux les équilibres liquide-liquide.

La modélisation thermodynamique des équilibres liquide-liquide et l'ajustement de paramètres de modèles reste néanmoins un sujet assez difficile ; en particulier le passage des binaires aux ternaires est plus délicat que pour les équilibres liquide-vapeur. De plus, il faut souvent utiliser des jeux de paramètres différents pour modéliser les équilibres liquide-liquide et liquide-vapeur du même mélange.

Nous en resterons donc là de la modélisation thermodynamique des équilibres liquide-liquide des systèmes ternaires, et nous nous intéresserons plutôt à leur mise en œuvre dans le cadre de procédés de séparation. Les coefficients d'activité[5] seront calculés par l'équation NRTL[2], avec des paramètres disponibles en banques de données.