Durcissement sans traitement thermique
Le durcissement de solution solide
Les éléments d’alliage en solution solide interstitielle ou de substitution, peuvent créer des distorsions élastiques du réseau par un simple effet stérique (figure suivante). Les contraintes résiduelles qui en résultent interagissent avec le champ de contrainte porté par les dislocations et offrent des obstacles efficaces au mouvement des dislocations. Ce mode de durcissement est par exemple utilisé dans les superalliages base nickel pour lesquels on ajoute du tungstène ou encore dans les aciers à outils alliés au tungstène et au cobalt.
Le durcissement par les joints de grains
Pour franchir un joint de grains et en relation avec la désorientation qu’il engendre entre deux grains voisins, une dislocation doit, afin de poursuivre sa propagation, changer de plan de glissement. Ceci nécessite un incrément de contrainte. Pour un alliage de composition donnée, le durcissement s’obtient donc en augmentant la surface totale des joints de grains c’est-à-dire en diminuant la taille de grains. La contrainte d’écoulement plastique s’exprime selon la loi expérimentale de Petch :
où \sigma_i et k sont des constantes caractéristiques du matériau et d est la taille de grains. Le tableau suivant détaille quelques valeurs pour des métaux purs.
\ce{Fe\alpha} | \ce{Nb} | \ce{Mo} | \ce{Cu} | \ce{Al} | \ce{Ni} | \ce{Ti} | |
---|---|---|---|---|---|---|---|
\sigma_i \, (\rm \, MPa) | 36 - 45 | 69 | 108 | 27 | 10 - 15 | 36 | 130 - 470 |
k \, ({\rm \, MPa.m^{0,5}}) | 7 - 23 | 13 | 57 | 4 | 2 | 1 | 5 - 10 |
La réduction de la taille de grains des alliages est par exemple obtenue en mettant en œuvre le procédé d’élaboration par métallurgie des poudres ou encore par des traitements de déformation, restauration et recristallisation. L’utilisation lors de la phase d’élaboration d’inoculants qui limitent la croissance des grains est également mise à profit couramment, dans les aciers par exemple.
Le durcissement par écrouissage
Une déformation plastique préalable effectuée à froid multiplie les dislocations dans le matériau. Dans ce réseau plus dense, les dislocations mises en mouvement par la contrainte de service appliquée ont un mouvement plus difficile car elles interagissent avec le champ de contrainte des dislocations initialement créées dans le matériau. On parle prosaïquement d’interaction avec les «arbres de la forêt». Il est aisé de comprendre ce mécanisme en examinant simplement une courbe de traction (figure suivante). Au cours de la sollicitation mécanique initiale, si la limite élastique conventionnelle R_{e\, 0,2} est dépassée et que l’on relaxe la contrainte, alors le matériau présente un allongement relatif permanent (OO’). Lors d’une sollicitation mécanique ultérieure, la caractéristique contrainte-allongement suit la droite (O’M), rejoint la courbe initiale en M qui définit une nouvelle limite d’élasticité R’_{e\, 0,2}, supérieure à R_{e\, 0,2}.
Remarque :
Les aciers inoxydables s’écrouissent beaucoup (R’_{e\, 0,2} > 2.R_{e\, 0,2}). L’augmentation de limite élastique s’accompagne d’une diminution de l’allongement à rupture. L’écrouissage est décrit par la loi empirique d’Hollomon : \sigma = k \varepsilon ^n,
où k et n dépendent du matériau, n est le coefficient d’écrouissage.
Il s’agit ici d’un mode de durcissement purement mécanique largement utilisé au plan industriel. Un exemple emblématique est celui du «skin-pass» en laminage de tôles aluminium permettant, par une passe finale imposant une légère déformation superficielle propre à rigidifier les pièces, de faciliter leur manutention sans risque de distorsion rédhibitoire.