Les écarts à l'idéalité

Définition

Pour rendre compte de la non-idéalité des mélanges liquides, on corrige l'expression de la fugacité[1] d'un constituant d'un mélange par rapport au cas idéal (équation de proportionnalité des fugacités et des compositions[2]), en introduisant un coefficient d'activité[3] \[{\gamma }_{i}\]  :

\[\frac{{f}_{i}^{\left(L,\mathrm{id}\right)}\left(T,P,\underline{x}\right)}{{f}_{i}^{\left(L,{R}_{i}\right)}\left(T,P\right)}={\gamma }_{i}\frac{{x}_{i}}{{x}_{i}^{\left({R}_{i}\right)}}\]

Remarque

Par construction, \[{\gamma }_{i}\] vaut l'unité dans l'état de référence[6] choisi pour le constituant \[i\].

Si on choisit comme référence pour chaque constituant son état de corps pur liquide, cette définition devient :

\[{f}_{i}^{\left(L\right)}\left(T,P,\underline{x}\right)={\gamma }_{i}{x}_{i}{f}_{i}^{\left(L,\mathrm{pur}\right)}\left(T,P\right)\]

avec \[{\gamma }_{i}=1\] pour \[{x}_{i}=1\]

Le coefficient d'activité[3] \[{\gamma }_{i}\] dépend de la température, de la composition, et, -dans une moindre mesure- de la pression.

En exprimant le potentiel chimique[7] du constituant \[i\] à partir de la définition de la fugacité[1], il vient :

\[\begin{array}{ccc} {\mu }_{i}^{\left(L\right)}\left(T,P,\underline{x}\right)& =& {\mu }_{i}^{\left(\mathrm{std}\right)}\left(T\right)+RT\ln\frac{{\gamma }_{i}{x}_{i}{f}_{i}^{\left(L,\mathrm{pur}\right)}\left(T,P\right)}{{P}^{\left(\mathrm{std}\right)}}\\ & =& {\mu }_{i}^{\left(L,\mathrm{pur}\right)}\left(T,P\right)+RT\ln\left({\gamma }_{i}{x}_{i}\right)\\ & =& {\mu }_{i}^{\left(L,\mathrm{id}\right)}\left(T,P,\underline{x}\right)+RT\ln \left({\gamma }_{i}\right) \end{array}\]

\[{\mu }_{i}^{\left(L,\mathrm{id}\right)}\] représentant le potentiel chimique[7] qu'aurait le constituant \[i\] dans le même mélange, si ce mélange était idéal.

Définition

Nous voyons apparaître dans l'expression du potentiel chimique[7] d'un constituant d'un mélange non-idéal le produit \[{\gamma }_{i}{x}_{i}\], que l'on appelle l'activité[4] \[{a}_{i}\] du constituant \[i\] du mélange.

En calculant l'enthalpie libre molaire \[g=\sum {x}_{i}{\mu }_{i}\] , on voit qu'elle s'exprime comme la somme de l'enthalpie libre molaire de la solution supposée idéale, et d'une enthalpie libre d'excès[8], qui représente les écarts à l'idéalité :

\[\begin{array}{cccc} g(T,P,\underline{x}) = & \underbrace{\sum_{i=1}^c x_i \mu_i^{(L,id)}(T,P,\underline{x})} &+& \underbrace{RT \sum_{i=1}^c x_i \ln \gamma_i} \\ & g^{(L,id)}(T,P,\underline{x}) &+& g^E(T,P,\underline{x}) \end{array}\]

Définition

L'enthalpie libre molaire d'excès[8] du mélange est définie comme :

\[{g}^{E}\left(T,P,\underline{x}\right)=RT\sum _{i=1}^{c}{x}_{i}\ln{\gamma }_{i}\]

elle représente la différence entre l'enthalpie libre de la solution réelle et l'enthalpie libre de la même solution, supposée idéale.

Connaissant l'enthalpie libre d'un mélange, on en déduit le potentiel chimique[7] d'un constituant par dérivation :

\[\begin{array}{ccc} {\mu }_{i}^{\left(L\right)}\left(T,P,\underline{x}\right)& =& {\left(\frac{\partial {G}^{\left(L\right)}}{\partial {N}_{i}}\right)}_{T,P,{N}_{j\ne i}}\\ & =& {\left(\frac{\partial \left(N{g}^{\left(L\right)}\right)}{\partial {N}_{i}}\right)}_{T,P,{N}_{j\ne i}}\\ {\mu }_{i}^{\left(L,\mathrm{id}\right)}\left(T,P,\underline{x}\right)+RT\ln{\gamma }_{i}& =& {\left(\frac{\partial \left(N{g}^{\left(L,\mathrm{id}\right)}\right)}{\partial {N}_{i}}\right)}_{T,P,{N}_{j\ne i}}+{\left(\frac{\partial \left(N{g}^{\left(E\right)}\right)}{\partial {N}_{i}}\right)}_{T,P,{N}_{j\ne i}} \end{array}\]

En identifiant terme à terme les deux membres de cette équation, on trouve finalement :

Fondamental

\[RT\ln{\gamma }_{i}={\left(\frac{\partial {N}^{\left(L\right)}{g}^{E}}{\partial {N}_{i}}\right)}_{T,P,{N}_{j\ne i}}\]

Cette relation montre que les coefficients d'activité[3] des constituants du mélange sont tous obtenus par dérivation d'une seule fonction enthalpie libre d'excès[8] : ce ne sont donc pas des fonctions indépendantes les unes des autres.

En utilisant l'arsenal habituel des relations entre fonctions thermodynamiques, on peut définir un volume d'excès[8] et une enthalpie d'excès[8] par :

\[\begin{array}{ccc}{\nu }^{\left(L\right)}\left(T,P,\underline{x}\right)& =& \sum _{i=1}^{c}{x}_{i}{\nu }_{i}^{\left(L,\mathrm{pur}\right)}\left(T,P\right)+{\nu }^{E}\left(T,P,\underline{x}\right)\\ {h}^{\left(L\right)}\left(T,P,\underline{x}\right)& =& \sum _{i=1}^{c}{x}_{i}{h}_{i}^{\left(L,\mathrm{pur}\right)}\left(T,P\right)+{h}^{E}\left(T,P,\underline{x}\right)\end{array}\]

avec :

\[\begin{array}{ccc}{\nu }^{E}& =& {\left(\frac{\partial {g}^{E}}{\partial P}\right)}_{T,\underline{x}}\\ {h}^{E}& =& -{T}^{2}{\left(\frac{\partial \left({g}^{E}/T\right)}{\partial T}\right)}_{P,\underline{x}}\end{array}\]
  • Le volume d'excès[8] représente la différence entre le volume du mélange et le volume de la solution supposée idéale, qui est en fait égal à la somme des volumes des corps purs séparés. Le volume d'excès[8] est presque toujours négligeable devant le volume du mélange. Par souci de simplification, nous le négligerons donc par la suite, ce qui revient à supposer l'enthalpie libre d'excès[8] indépendante de la pression.

  • L'enthalpie d'excès[8] est la différence entre l'enthalpie du mélange et l'enthalpie de la solution supposée idéale, qui est en fait égale à la somme des enthalpies des corps purs. Elle correspond en fait à la chaleur qui est absorbée lors de l'opération de mélange à pression constante, pour maintenir la température constante. Certaines opérations de mélange sont exothermiques, ce qui correspond à \[{h}^{E}<0\], d'autres endothermiques (\[{h}^{E}>0\]).

Fondamental

Toutes les propriétés thermodynamiques d'un mélange réel peuvent être déduites de la connaissance des propriétés des corps purs et de la fonction \[{g}^{E}\].