Lois phénoménologiques de la diffusion : les équations de Fick
Les équations de Fick sont les lois macroscopiques établies par analogie avec des phénomènes similaires à la diffusion (conduction thermique et électrique).
On peut en donner une démonstration simplifiée en les rattachant aux mécanismes microscopiques décrits précédemment.
Première loi de Fick
Envisageons un mécanisme lacunaire unidirectionnel (voir Fig.). Soient deux plans atomiques (1) et (2) distants de et de surface unité. Intéressons-nous à la diffusion d’une espèce dans la solution binaire étudiée. Soit N_1 le nombre d’atomes de cette espèce dans le plan (1) et N_2 le nombre d’atomes de la même espèce dans le plan (2). La densité de flux de matière J_D traversant le plan médian (pointillés) est la somme algébrique des flux J+ et J- respectivement dans les sens positif et négatif choisis. Ce flux net est le flux macroscopique mesurable à un instant donné.
On a J+ = (\Gamma_D N_1)/2 et J- = (\Gamma_D N_2)/2
(le facteur 1/2 étant introduit pour tenir compte du fait qu’un des atomes peut se déplacer vers la droite ou vers la gauche de manière équiprobable).
Par suite, J_D = \left(J+\right) - \left(J-\right) = \Gamma_D (N_1 - N_2)/2.
Les concentrations atomiques en atomes de l’espèce étudiée dans les plans (1) et (2) sont respectivement c_1 = N_1 / a et c_2 = N_2 / a d’où J_D =\left(J+\right) - \left(J-\right) = a \Gamma_D (c_1 - c_2)/2.
La grandeur a étant petite, on peut dire qu’il existe, au point considéré, un gradient de concentration :
\frac{\partial c}{\partial x} = \frac{c_2 - c_1}{a}
et donc :
J_D = -\frac{\Gamma _D \cdot a^2}{2} \frac{\partial c}{\partial x}
On utilise des dérivées partielles pour tenir compte de la dépendance de c en x (distance) et en t (temps).
On pose en général D, le coefficient de diffusion de l’espèce considérée :
D = \frac{\Gamma _D \cdot a^2}{2}
et il vient la première loi de Fick :
J_D = -D \frac{\partial c}{\partial x}
J_D est exprimé en {\rm \, mol.m^{-2}.s^{-1}} (ou {\rm \, g.m^{-2}.s^{-1}}), D est exprimé en {\rm \, m^{2}.s^{-1}}. Cette relation met en évidence que, dans une phase, s'il existe un gradient de concentration, la mobilité des atomes entraîne un flux de matière qui tend à égaliser les concentrations (le signe - est introduit pour tenir compte du fait que flux et gradient de concentration sont de signe opposé, le flux s’établissant vers la concentration la plus faible).
Le coefficient de diffusion est une mesure de la mobilité des atomes, il est directement proportionnel à la fréquence de saut des atomes et peut s’exprimer par la relation
D = D_0 \cdot \exp \left[ - \frac{\left( \Delta H_t + \Delta H_f \right)}{kT} \right]
où \Delta H_t + \Delta H_f représente l’enthalpie d’activation de la diffusion (remarquons que dans un mécanisme interstitiel, seul \Delta H_t est à prendre en compte). Le tableau suivant donne les valeurs de D_0 et de l’enthalpie d’activation pour quelques couples de diffusion.
cristal initial | espèce diffusante | D_0\rm (cm^{2}.s^{-1}) | enthalpie d’activation {\rm (eV)} |
---|---|---|---|
\ce{Cu} | \ce{Cu} | 0,2 | 2,04 |
\ce{Cu} | \ce{Zn} | 0,34 | 1,98 |
\ce{Si} | \ce{Al} | 8 | 3,47 |
\ce{Ag} | \ce{Au} | 0,28 | 1,98 |
Deuxième loi de Fick
Considérons un volume de matière compris entre x et x + dx, comme indiqué ci-dessous, et exprimons la conservation de l’espèce diffusante pendant un temps dt.
La somme algébrique des flux entrant et sortant est égale à la variation de la concentration de l’espèce diffusante dans le volume considéré :
\left[ J \left( x \right) - J \left( x + dx \right) \right] \cdot dt = \frac{\partial c}{\partial t} \cdot dt \cdot dx
- \frac{\partial J}{\partial x} \cdot dx \cdot dt = \frac{\partial c}{\partial t} \cdot dt \cdot dx
- \frac{\partial J}{\partial x} = \frac{\partial c}{\partial t}
En utilisant la première loi de fick :
J = -D \frac{\partial c}{\partial x}
on a \quad \frac{\partial \left[ D \frac{\partial c}{\partial x} \right] }{\partial x} = \frac{\partial c}{\partial t} \quad \Leftrightarrow \quad D\frac{\partial{}^2 c}{\partial x^2} = \frac{\partial c}{\partial t}
en supposant D constant (ce qui est en réalité une approximation car D dépend de x, en effet l’ambiance que rencontre l’espèce diffusante varie continûment dans l’espace \left(x\right) - \left(x + dx\right)). Ceci constitue la deuxième loi de Fick. Elle exprime le fait que la variation de concentration en fonction du temps est proportionnelle à la dérivée seconde de la concentration par rapport à la distance.
Cette équation est susceptible d’intégration en fonction des conditions initiales et des conditions aux limites du système.